être Gros-Jean comme devant

« Être Gros-Jean comme devant » : origine et signification

L’expression, quelque peu désuète, « Être Gros-Jean comme devant » fait référence à l’espoir et aux illusions déçues de personnes (à l’origine rustres et sans le sou)dont l’entreprise échoue malgré les efforts fournis.

Signification :

  • Être dans la même situation qu’avant en dépit des efforts fournis/ Avoir conçu de grandes espérances et se retrouver dans la même situation qu’auparavant.
  • Avoir subi une déconvenue, ne rien avoir gagné dans une entreprise dont on espérait beaucoup.
  • Ne pas être plus avancé.

Origine :

Jusqu’au XVIIIe siècle, un Gros-Jean était un paysan, un personnage de farce médiévale, un benêt qui se faisait toujours duper. N’arrivant pas à comprendre quelque chose, même après lui avoir expliqué clairement, il était aussi bête après qu’avant. Gros-Jean désigne aussi un homme qui ne possède rien.

Gros-Jean, composé de gros (grossier, rustre, simple) et du nom propre Jean, est devenu un terme péjoratif désignant une personne niaise, une brute, un abruti, un rustre sans esprit, un lourdaud sans le sou. Ce terme apparaît chez Rabelais en 1552 dans le Prologue du Quart Livre, « gros Jan » est le nom d’un personnage d’une chanson.

Autrefois, la forme adverbiale « devant », composée de « de » et « avant », signifiait « avant », « auparavant » .

L’expression :

L’expression « Être Gros-Jean comme devant  » se retrouve chez Jean de La Fontaine dans la fable « la Laitière et le pot au lait » Fables, VII,9, 1678. La laitière de la fable nourrit de grandes espérances (bonne fortune, ascension sociale…) et voit ses espoirs réduits à néant suite à un coup du sort, se retrouvant au point de départ.

Il existe d’autres expressions avec le personnage niais de « Gros-Jean » telle que « Gros-Jean en remontre au curé » désignant celui qui ne sait rien mais prétend apprendre des choses à celui qui détient le savoir.

On trouve de nombreuses variantes suggérant l’inanité des efforts qu’un personnage a déployés pour se retrouver tel qu’il était. Et me voilà rimeur comme devant (Sainte-Beuve, Poésie, 1829, p. 82). Toujours aussi Jean-des-Figues que devant (Arène, Jean des Figues, 1870, p. 61).

L’ajout de « devant » après Gros-Jean renforce l’idée d’immobilisme, de stagnation dans le temps. Être Gros-jean comme devant, ou « être au même point qu’avant en dépit des espérances, des illusions et des efforts fournis, renvoie à une forme de fatalisme de l’évolution impossible des personnes peu éduquées ou peu fortunées.

« On m’élit roi, mon peuple m’aime ; Les diadèmes vont sur ma tête pleuvant : Quelque accident fait-il que je rentre en moi-même, Je suis Gros-Jean comme devant. »Jean de La Fontaine, La Laitière et le pot au lait, Livre VII – Fable 10 (1678

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