L’expression « se faire limoger« , correspondant pour quelqu’un ayant des responsabilités à tomber brutalement en disgrace, à se faire exclure, renvoie à un épisode militaire important de la Première Guerre mondiale.
Signification :
verbe limoger :
- destituer un officier général de ses fonctions;
- par analogie, congédier des personnes occupant un poste élevé.
expression « se faire limoger » :
- se faire relever de son commandement;
- par extension, pour quelqu’un ayant des responsabilités, être mis en disgrâce ou être frappé d’une sanction disciplinaire (mise à la retraite, révocation, licenciement…).
Origine :
Suite aux premières défaites françaises en août 1914, le général Joffre, dans un télégramme du 15 août 1914 adressé à Messimy, ministre de la Guerre, désigna près de la moitié de ses subordonnés comme responsables de l’échec. Ce dernier ordonna à Joffre de les relever de leur commandement et de les renvoyer à l’arrière, sans indiquer de lieu. Dès le lendemain, Joffre répercuta l’ordre à ses commandants d’armée, mais toujours sans indication de lieu d’assignation. Il choisit le 27 août la 12e région militaire, dont le siège était à Limoges.
Messimy, ministre jusqu’au 26 août 1914, s’attribua, dans ses mémoires, la destination et le mot : « Guillaumat, d’après mes ordres, leur enjoignit de quitter Paris et de se rendre à… Limoges. Pourquoi Limoges, m’a-t-on souvent demandé ? Je voulais que ces généraux, déclarés inutilisables au front, fussent éloignés de Paris, où ils n’auraient fait que clabauder. Où les envoyer ? Lyon, Marseille, Bordeaux étaient de trop grandes villes pour ne pas devenir très vite des foyers d’intrigues politico-militaires. J’hésitai un instant entre Nantes, Rennes et Limoges. Il me fallait opter : Limoges fut choisi ». Et, toujours dans ses Mémoires : « Le mot n’existait pas encore, puisque c’est moi qui en ai enrichi la langue française ».
L’expression :
Le général Guillaumat écrivit, le 19 juillet 1915 : « L’expression « aller à Limoges » est devenue classique pour les généraux mis au rancart. Messimy les mettait aux arrêts, son successeur les internait, notamment, à Limoges où il n’y en eut jamais plus d’une dizaine sur l’ensemble. ». Aujourd’hui, on les laisse aller où ils veulent, mais l’expression est restée.
L’euphonie du mot « limoger » (d’où dérive le mot « limogeage« ) fit son succès, s’imposant à partir de 1916.
Citation :
« Le mot n’existait pas encore, puisque c’est moi qui en ai enrichi la langue française ». Messimy